dimanche 5 juillet 2009

Décalages

La vie continue. Je n'ai pas écrit depuis 2 semaines, je pourrais mettre la faute sur le fait que je travaille beaucoup mais c'est plutôt parce que j'ai le syndrome de la page blanche. Je pense à des choses que j'aimerais écrire pendant que je suis en voiture ou au gym et après j'oublie...

Et bien que je travaille beaucoup, j'ai beaucoup de temps à moi. Le fait d'avoir un "boy" à la maison me donne beaucoup de temps libre. En gros, quand je suis à la maison, je n'ai aucune corvée à faire. La table est mise matin et soir, pleine de nourriture: pain, beurre, tartinades, fromage, lait, thé, café le matin et du riz, des pates, de la viande et des frites le soir. Bon c'est un peu répétitif mais on s'habitue très vite (trop vite?) à ne pas avoir à débarasser, faire la vaisselle, etc. Mais ce n'est pas tout, c'est vraiment la grande paresse puisque mes vêtements apparaissent pliés et repassés sur mon lit, qui est lui changé tout les trois jours et fait tous les matins. Mes chaussures sont lavées et cirées. Il y a 2 semaines, j'ai constaté qu'Abdallah, le boy, lavait des chaussures que je n'avais même pas mises depuis la dernière fois qu'il les avait lavées. J'ai essayé de lui expliqué mais la communication est extrêmement difficile. On a donc créée le système "ici, nettoyer. Là, pas nettoyer", il ne nettoie que ce je mets à un endroit précis, sans plus. C'est fou comment des détails deviennent compliqués quand on ne parle pas la même langue.

Ok, j'ai bien appris 3-4 mots, bonjour (Mwuramutse), bonsoir comme dans buenas tardes (Mwiriwe), comment ça va (Amakuru) et merci (Murakoza). Ça n'aide pas vraiment la communication mais comme partout ailleurs, les gens apprécient quand un étranger fait l'effort de baragouiner 2-3 mots dans leur langue. Ça, c'est vraiment un truc universel. Sinon les Rwandais parlent tous plus ou moins un peu le français et l'anglais, mais c'est pas évident. Je crois qu'un problème c'est qu'il n'ont pas vraiment de cours une fois qu'ils ont quittés l'école. Le garde de nuit à la guest house, lui est plus typique. Il passe ses nuits (quand il ne dort pas...) à étudier le dictionnaire Kinyarwanda-Anglais*. À côté d'Abdallah c'est un linguiste mais nos conversations sont limitées et même s'il connait les mots il les prononce d'une façon incompréhensible. Le plus incroyable est qu'il étudie Excel (oui, oui Microsoft Excel) dans un recueil de photocopies. Sans ordinateur. "Pour insérer une colonne, placez le curseur dans le cellule désirée et sélectionnez le menu Insertion, Insérer une colonne." Ouf...

Le Kinyarwanda n'est pas une langue intrinsèquement compliquée (comme le japonais par exemple) mais tellement différente du français que ça la rend difficile à apprendre. Il n'y a pas de mots ou de racines communes et la prononciation est différente, les Y se prononcent J, les L et les R sont inversés et les K se disent CH. Ce qui n'aide pas les Rwandais à apprendre le français ou l'anglais.

Par exemple, un Rwandais me dit un jour:
"I have rived in Chigari for many yeals"

Hein? De kossé?

En fait c'était "I have lived in Kigali for many years"
Donc Kigali s'écrit Kigali mais en prononciation autochtone, ça se dit "Chigari". Et pour rendre ça encore plus compliqué, il y en a qui le disent à la façon rwandaise et d'autres pas. arrrgh!

Une autre fois, Abdallah vient me voir le matin et me dit et me repète "Payrotee" (ça sonnait comme "Paille rotie"). Tel un mantra, il me répétait payrotee, payrotee, payrotee. En fait il voulait dire que le "driver" était arrivé... Il avait vu dans le dictionnaire que driver c'était pilote en français. Et avec l'accent et le L qui devient un R, pilote est devenu Payrotee.

Et aujourd'hui, je suis allé à la coopérative d'artisans située en face d'UTC, à Kiyovu. Il y a là, entre autres choses, plein de sandales en cuir. Mais ayant été averti que le cuir de chèvre était odorant très longtemps, je demande à un vendeur de quel animal vient le cuir. "Du Kenya" me répond-il... Ok, on essaie à nouveau en français, en anglais, rien à faire le type ne comprends pas et me répond toujours que les sandales du Kenya. Son collègue arrive et pour lui c'était beaucoup plus simple: ça vient du cuir monsieur! J'ai abandonné parce que qu'il commencaient à me trouver stupide de ne pas savoir que c'était du cuir ce que j'avais à la main...

L'Afrique n'est pas exactement comme je la voyais mais une choses est vraie: il faut de la patience.

*Pour un bon dictionnaire Anglais-Kinyarwanda, visitez le blog de Morgan

2 commentaires:

  1. Très intéressant. J'aime. Tu me fais voyager à travers tes écris. La difficulté des langues... Je pense au gardien de nuit qui étudie excel sans ordi. Admirable. Muy interessante.

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  2. j'aime ton regard sur ta vie africaine.
    En Turquie j'ai vécu des situations linguistiques similaires; patience oui.
    dimanche matin à Papineauville je t'envoie ceci pour te dire que Bruno Blanchet est au Rwanda, petite pensée pour mathieu.
    oh et heureux anniversaire!

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